• La pesanteur et la grâce

     

     

    La faute

     

    La question que pose Claudius dans sa prière (Hamlet, III, 3) est centrale :

     

    Peut-on être pardonné et être toujours fautif ?

    May one be pardoned and retain th' offence ? 

     

       Aussi extraordinaire que cela puisse paraître, la réponse est oui. Le pardon n’efface pas l’offense, il se surajoute à la faute et la métamorphose en grâce. Hannah Arendt l’explique très simplement (Condition de l’homme moderne) : « Le pardon est exactement le contraire de la vengeance. Le pardon est la seule réaction qui ne se borne pas à réagir mais qui agisse de façon nouvelle et inattendue. » Autrement dit, le pardon est un miracle. C’est ainsi que Jésus fait souvent précéder ces guérisons de l’expression : « Tes péchés sont pardonnés ». Mais il ajoute : « Ta foi t’a sauvé ». Car, encore faut-il croire au pardon pour être pardonné ! C’est ce que ne comprend pas Claudius :   

     

    Essayer le repentir ; de quoi n’est-il pas capable ?

    Mais de quoi est-il capable quand on est incapable de se repentir ?

    Ô, misérable condition !

     

    Try what repentance can. What can it not ?

    Yet what can it when one can not repent ?

    O wretched state !  

     

       Claudius, comme Macbeth, ne parvient pas à se débarrasser de sa mauvaise conscience.

     

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  • La danse 

     

    La joie

     

    Mieux que tous les arts réunis, la danse est capable d’exprimer l’élan vital, l’enthousiasme, le bonheur de vivre, tous les désirs, comme si elle seule contenait l’essentiel des battements du cœur qui nous maintiennent en vie ! Avant de parler, l’homme, dit-on, a chanté. C’est probable. Et en chantant, il est impossible qu’il n’ait pas dansé.

      Que reste-t-il aujourd’hui de cette belle impulsion primordiale ? Hélas ! À peu près rien. La danse contemporaine est d’une tristesse à pleurer. Elle est sombre, elle est neurasthénique et honteuse. Elle s’affaisse, elle se traîne, elle a perdu la trace du ciel qui l’appelait. La source s’est tarie.

     

    Le Sacre par Pina Bausch

     

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  • Shakespeare 

     

     

     

    Les tyrans 

     

    Cassius. And why should Cæsar be a tyrant then ?

    Poor man ! I know, he would not be a wolf,

    But that he sees the Romans are but sheep ;

    He were no lion, were not Romans hinds.

     

    CASSIUS. – Et pourquoi donc César serait-il un tyran ?

    Le pauvre ! Je suis sûr qu’il ne serait pas un loup

    S’il ne voyait que les Romains ne sont que des moutons ;

    Il ne serait pas un lion, si les Romains n’étaient pas des agneaux bêlants.

     

                                          Jules César, acte I, scène 3, 103-106.

     

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  • Éducation 

     

     

    Les enfants du numérique

     

    Quels sont les produits qui attirent les consommateurs rassasiés d’aujourd’hui ? Essentiellement des objets qui transportent de l’immatériel, c’est-à-dire de l’information, des bits, des 0 et des 1, tout ce qui touche à l’informatique, aux ordinateurs et à l’Internet. Un peu difficile à assimiler pour les vieillards, l’informatique paraît un « jeu d’enfant » : voyez mon bébé avec son téléphone, il a tout compris. Poussez ici un nouveau petit soupir d’émerveillement. Dans leur incommensurable naïveté, nos contemporains tombent régulièrement en extase devant les prodiges des petits génies qui jouent sur leurs consoles. Il n’y a pourtant aucun motif à s’étonner. Tous les enfants du monde apprennent avec une désarmante facilité des codes autrement plus complexes qu’on appelle les langues. Pourquoi seraient-ils rebutés par des systèmes binaires pour la plupart, des langages élémentaires ? Un petit Indien d’Amérique apprend avec la même facilité à reconnaître les traces des bêtes sauvages sur le sentier de la chasse. Le petit Africain intègre, sans effort, des schémas rythmiques qu’une oreille occidentale non exercée n’entendra jamais. Tout cela est affaire d’entraînement et de pratique, tout le monde en convient. Alors, où est la magie de l’informatique ? Correspond-elle à quelque chose de tellement essentiel, de tellement profond qu’elle est « naturelle » aux enfants ? Se méfier de toute qualification de « naturel ». Alors, comme ça, les enfants auraient une espèce d’instinct de l’informatique ? Pourtant, rien n’est moins « naturel » que l’informatique. Les enfants l’apprennent comme ils apprennent à boucler leurs lacets (enfin, de moins en moins…) ou à reconnaître leur main droite de leur main gauche.

     

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  • Baudelaire 

     

     

         Frères qui trouvez beau tout ce qui vient de loin !
         Nous avons salué des idoles à trompe ;
         Des trônes constellés de joyaux lumineux ;
         Des palais ouvragés dont la féerique pompe
         Serait pour vos banquiers un rêve ruineux ;
         Des costumes qui sont pour les yeux une ivresse ;
         Des femmes dont les dents et les ongles sont teints,
         Et des jongleurs savants que le serpent caresse.
         Et puis, et puis encore ?            
     

    Le voyage

     

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