• I.A. 

     

     

    Un « bouillon de culture »

     

    Qu’est-ce que Chat GPT ? Une collection de citations sans guillemets. C’est un salmigondis de pensées ressassées, un minestrone de banalités et de conventions. C’est « l’expression » d’une opinion statistique. Ne cherchez pas une idée originale. Si elle a jamais percé, elle a déjà été effacée.

       Déjà Wikipédia avait été conçu, en 2001, à partir de la contribution d’anonymes, selon le principe que « le savoir appartient à tout le monde ». Comme nous possédons, a priori, tous la même intelligence, il paraît équitable qu’elle soit partagée par tous. Ce qui est affligeant, c’est que les articles ne soient pas signés, qu’ils soient contrôlés par des « relecteurs » que nous ne contrôlons pas nous-mêmes. Je ne connaîtrai donc jamais la personne qui m’instruit. Devant mon écran, je suis comme devant une cloison, un mur, je suis enfermé dans mon asile de solitude, réduit à ma seule opinion. Si je me trompe, c’est tant pis pour moi. Si huit milliards d’internautes se trompent ensemble, c’est tant pis pour l’humanité.

       Quand nous achetons des produits, dans le commerce, nous vérifions la marque, l’origine, nous préférons les noms reconnaissables : Yves Saint-Laurent, Siemens, Moët & Chandon. Il ne viendrait à l’idée de personne d’acheter une voiture sans marque, anonyme. Les « produits » de la pensée sont, eux, interdits de « label ».

       Le « bouillon de culture » des machines « pensantes » n’a rien à voir avec la culture, il ressemble plutôt à une soupe de micro-organismes vaguement indigestes baignant dans une mixture informe...

     

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  • Les émigrés

     

    Où se « fabrique » le monde de demain ? 

     

         Noyés dans la Méditerranée :

         Combien de talents disparus à jamais ?

         Combien de promesses non tenues ?

         Combien de jeunes gens perdus par leur rêve fervent ?

         De quoi privent-ils l’Europe vieillissante ?

         Qu’amputent-ils à leur pays de naissance ?

         Quel mal font-ils à leurs parents ?

         Combien de désirs utiles gaspillés ? 

     

    « Les immigrés se retrouvent aussi dans des quartiers où l’on est solidaire, où l’on a des échanges fructueux, où l’on partage et s’entraide. Il s’y instaure une vie collective, sans frontière culturelle ou religieuse. Il existe alors un véritable brassage social et culturel et même, avec des mariages mixtes, un mélange enrichissant, entre les diversités. » 

    Pierre Alain Lemaître, Dépasser les antagonismes interculturels, L’Harmattan, 2020.

     

       Ces sociétés naissantes, nous ne les écoutons même pas, nous ne les regardons pas. Autant de flambeaux allumés et aussitôt éteints.

     

    La Goutte d'Or

      

     

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  • Enfants

     

     

     

    Zone sans enfants

     

    En Corée du Sud, pays avec le taux de fécondité le plus bas du monde, les « zones sans enfants » au sein de l’espace public restent encore profondément acceptées par la société et ancrées dans les mœurs. Il existe des centaines de périmètres interdits aux enfants afin de garantir davantage de « quiétude » aux adultes.

       Les premières zones sans enfants, comprenant des cafés, parcs et restaurants, sont apparues il y a une dizaine d'années et se sont étendues dans plus de 500 sites du pays.

       Exception coréenne ou tendance de fond ? La perspective fait froid dans le dos. Imagine-t-on un monde sans enfant ? De toute façon, il ne durerait pas longtemps.

     

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  • Le bon Samaritain perverti 

     

     

     

    Monsieur Perrichon

     

    Le Voyage de Monsieur Perrichon est une comédie d’Eugène Labiche et Édouard Martin, représentée pour la première fois à Paris le 10 septembre 1860.  

       L’histoire débute à Paris, gare de Lyon. M. Perrichon, sa femme et sa fille, prennent pour la première fois le train, pour aller en vacances à Chamonix, à la Mer de Glace. À la gare, ils sont abordés par deux jeunes hommes, Armand Desroches et Daniel Savary, charmés par la fille de M. Perrichon, qui les avait rencontrés à un bal, peu avant. 

       Une lutte loyale mais acharnée commence entre les deux jeunes hommes, chacun voulant faire route avec la famille Perrichon pour gagner sa confiance et son affection, et ainsi la main d'Henriette. 

       À la Mer de Glace, Armand Desroches sauve la vie de Monsieur Perrichon tombé de cheval, et en est chaleureusement félicité par la famille, mais l'évocation de l'épisode semble gêner le beau-père en puissance. Voyant cela, Daniel Savary a une idée : il fait semblant de tomber dans une grotte et se fait sauver par M. Perrichon qui, très fier de lui, le prend désormais en affection et sous sa protection. 

    * 

       L’analyse mimétique de la pièce est facile à faire. Les deux jeunes prétendants entrent en rivalité pour les beaux yeux d’Henriette. Et le « duel » se déroule par le truchement du papa — à l’époque, c’était encore le père qui décidait qui devait épouser sa fille !  

       L’originalité de l’intrigue tient dans l’inversion de la séduction. Armand croit, naïvement, que Monsieur Perrichon lui sera reconnaissant de l’avoir sauvé. Il compte sur sa « gratitude naturelle ». Daniel renverse la situation et « se fait sauver » par le papa. Monsieur Perrichon n’en ressent pas autre chose que de l’orgueil. Il s’aime lui-même et, par ricochet, se prend d’affection pour Daniel. 

       Dans le premier cas, « le bon Samaritain », c’était Armand. Mais il ne parvient pas à se faire aimer. Dans le deuxième cas, « le bon Samaritain », c’est Monsieur Perrichon. Mais au lieu « d’aimer » son sauveur, Daniel sait qu’il peut en espérer un retour gratifiant. 

       Labiche et Martin jouent habilement de la parabole du bon Samaritain, pour un public bourgeois parisien du XIXe siècle suffisamment christianisé. Mais en retournant la situation, ils inversent aussi la « morale » : la gratitude ne vaut rien, seul l’intérêt paie. On peut dire qu’il s’agit là d’une perversion du message chrétien... dans un XIXe siècle capitaliste, « confit en dévotions », mais obnubilé par l’argent. 

     

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  • Shakespeare  

     

     

    Le religieux hypocrite

     

    Gloucester*. – And thus I clothe my naked villainy

    With old odd ends stol’n forth of holy writ,

    And seem a saint, when most I play the devil.

     

    GLOUCESTER. – C’est ainsi que j’habille ma pure méchanceté

    De vieux lambeaux des écritures sacrées,

    Et je parais un saint au moment où je suis le pire démon.

     

    * Il s’agit du futur Richard III.

     

    Richard III, I, 3, 336-338.

     

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